Voix off
Mais qu'est-ce que c'est… oh c’est bizarre… c'est tout tordu… et la lumière… Quelqu'un a joué avec un filtre Instagram ? Mais non… Imaginez le tableau : on est en 1890. Armand Peugeot sort la première automobile française, Clément Ader fait voler le premier prototype d'avion, Emile Zola nous emmène en locomotive dans « La Bête humaine ». On parle de vitesse et de technologie. Mais pas Vincent Van Gogh. À 37 ans, sa santé mentale est aussi chancelante que sa santé physique. Cet autodidacte est pourtant toujours aussi créatif. Regardez bien : un ciel sombre, des lignes flottantes, une paysanne qui nous tourne le dos et de l'herbe tout juste esquissée. Pas de doute, Van Gogh reste une énigme. Et son tableau aussi, avec cette église que l'on ne voit que de dos, et qui semble vaciller, y a-t-il un lien avec l'ancienne vocation de pasteur de l'artiste ? Ces couleurs franches, cette absence de ligne droite, est-ce la réalité qui refuse de se laisser cerner par le peintre ? Avec ses pavés ensoleillés, l'église qui fait de l'ombre et ce ciel du soir, la toile paraît en tout cas avoir été peinte au fil de la journée, avec le soleil qui se déplace. Ces deux chemins partent dans deux directions opposées pour contourner l'église, symbolisent-ils toutes les interprétations qui s'offrent à nous ? A moins que tout cela soit l'expression du chaos intérieur de l'artiste. Comment savoir ce qui passe dans l'esprit tourmenté d'un homme peignant 70 toiles dans les derniers jours de sa vie ? En gommant la perspective, Van Gogh sort des rangs de l'impressionnisme ; on le qualifie de postimpressionniste, ouvrant la voie aux courants qui suivront, dont l'expressionnisme et le fauvisme. Quasiment inconnu, Vincent van Gogh se donne la mort peu après, dans le dénuement ; malgré plus de huit cents tableaux réalisés, il n'en a vendu qu'un seul. « L'Église d'Auvers-sur-Oise » est acquise par l'État en 1952. Elle rejoint le musée d'Orsay en 1986, dès son ouverture.