Sobriété

Disponible jusqu'au 02/01/2029 - 23:59Disponible jusqu'au 02/01/2029

Le mot « sobriété » se répand de plus en plus dans le domaine de l’écologie. Mais d’où vient-il ? 

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Imaginer des mesures pour mettre en place une politique de sobriété.

Adultes
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Vocabulaire : écologie
Vocabulaire : étymologie
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    La notion de sobriété désignait à l’origine un choix de vie vertueux. Comment le sens de ce mot est-il passé d’une modération choisie à une contrainte collective imposée par les crises écologiques et énergétiques ? Au-delà de l’exploration terminologique, cet épisode vous guide dans une réflexion sur nos modes de vie et l'avenir de notre planète. 

    Chaîne d'origine
    TV5MONDE
    - Modifié le
    19/12/2024
    Voix off (Aurore Vincenti, linguiste)
    « Une tourniquette pour faire la vinaigrette, un bel aérateur pour bouffer les odeurs, des draps qui chauffent, un pistolet à gaufres, un avion pour deux, et nous serons heureux… ». En 1956, Boris Vian1 chantait La complainte du progrès2, déplorant avec dérision le remplacement des sentiments et des émotions par le cycle production-consommation, donnant l’illusion de la satisfaction et de l’accomplissement de soi. Depuis les années 1970, la pensée écologique constate que nos modes de vie débridés contribuent grandement à la destruction de la vie sur terre et prône donc la réduction drastique de nos consommations. C’est dans cette optique que se diffuse la notion de sobriété, aux côtés de celle de frugalité ou encore d’austérité. Ces mots n’ont rien de nouveau, mais ils deviennent des concepts au sein du champ de l’écologie. Lorsque sobriété se met à fleurir à cette époque, il décrit une démarche choisie de limitation de sa consommation dans un souci de responsabilité. Cette démarche se traduit par des pratiques quotidiennes, comme le fait de limiter sa consommation de viande, baisser le chauffage en hiver et éviter la climatisation en été, cesser de prendre l’avion et préférer le train, entre autres choses. Elle est au cœur concret d’une pensée de la décroissance qui ne repose non sur la croyance en notre salut par la technique, mais sur des aménagements dans nos modes de vie qui mettent en question nos habitudes et nos normes de confort. Cette dimension individuelle se reflète également dans l’origine du mot puisque sobrius en latin est l’antonyme d’ebrius, qui a donné… ébriété ! Étymologiquement, est sobre celui ou celle qui n’est pas ivre ou, comme le définit le dictionnaire Furetière3 au XVIIe siècle, qui « s’abstient de boire et de manger au-delà de ce qui est nécessaire pour vivre. » De ce sens propre du mot a émergé un sens figuré qui s’écarte du domaine du boire et du manger pour toucher à toute forme d’excès, ou comme le disaient les Grecs d’hubris, qui est perçue comme un mal et un vice. Au contraire, la modération, la tempérance est au cœur de la définition du terme sobre. Et c’est la connaissance de « ce qui est nécessaire pour vivre » qui est le sceau d’une âme vertueuse. Cette dimension vertueuse de la sobriété est encore valorisée dans l’usage contemporain du terme. Pourtant, l’emploi du mot dans un contexte écologique a évolué entre les années 70 et 2000. À l’approche du pic pétrolier4, on s’est mis à parler de sobriété, non plus comme d’un mode de vie librement choisi dans le cadre d’un projet d’autonomie individuelle, mais dans un contexte d’adaptation à une contrainte matérielle et énergétique. Alors qu’émerge la fin de l’abondance dans le discours politique, on fait face à une injonction de sobriété. L’emploi du mot décolle en France en 2022, alors que la guerre éclate en Ukraine et que le Gouvernement présente un plan de sobriété énergétique à laquelle il appelle les citoyens. Dans ce cadre, la sobriété porte un projet démocratique : soit une juste répartition des efforts fournis et des ressources énergétiques afin de rendre les écarts de richesse plus supportables. Entre la démarche volontariste et l’engagement sociopolitique d’adaptation à des contraintes écologiques majeures, la sobriété porte un projet d’avenir qui se dessine au présent. 
     
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    [1] Boris Vian (1920-1959) était un écrivain, poète, parolier, chanteur, critique musical, musicien de jazz (trompettiste) et directeur artistique français. (source : Wikipédia.)
    [2] La Complainte du progrès (Les Arts ménagers) est une chanson créée par Boris Vian (paroles) et Alain Goraguer (musique) en 1955. Critique satirique de la société de consommation qui commence alors à se développer en France, elle est célèbre notamment pour ses énumérations de biens de consommation fantaisistes, avec des jeux de langage et des inventions. (source : Wikipédia.)
    [3] Référence au Dictionnaire universel contenant généralement tous les mots françois tant vieux que modernes et les termes de toutes les sciences et des art d'Antoine Furetière, publié la première fois en 1690. Antoine Furetière (1619-1688) était un homme d'Église, poète, fabuliste, romancier et lexicographe français. (source : Wikipédia.)
    [4]Le « pic pétrolier » est le point où la courbe de l'extraction mondiale de pétrole atteint son niveau maximal avant de connaître par la suite un déclin dû à l'épuisement progressif des réserves de pétrole contenues dans le sous-sol terrestre (source : Wikipédia.)