Philanthropie : la Suisse pour modèle ?

Disponible jusqu'au 21/05/2025 - 23:00Disponible jusqu'au 21/05/2025
Utilité publique, service au bien commun, philanthropie... Sur ce sujet, la Suisse est leader.
Comprendre ce qu’est la philanthropie, les avantages pour les entreprises et donner son opinion sur cette thématique.
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Geopolitis-Philantropie-Video
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    La Suisse concentre beaucoup de richesses mais connaît une longue tradition philanthropique qui remonte à 1835 avec l'établissement à Zurich d'un cadre juridique et fiscal favorable. Aujourd'hui, le monde des fondations évolue vite et plusieurs initiatives émergent pour donner un nouvel élan à la philanthropie.
    Comment s'explique la position dominante de la Suisse en matière de philanthropie ? Quels sont les principaux enjeux pour ce secteur très particulier des fondations en Suisse et dans le monde ?
    Production
    RTS / TV5MONDE
    Chaîne d'origine
    RTS
    - Modifié le
    10/08/2021
    LE CONTEXTE
     
    Tous les jours de l'année, en Suisse, il se crée une fondation.  En gros, près de 400 fondations par an demandent leur inscription au registre du commerce en mentionnant un but d'utilité publique. Nous y voilà : utilité publique, service au bien commun, philanthropie,  et sur ce sujet, la Suisse, on le dit tout de suite, est leader. 12 909 fondations, au dernier recensement, ce qui fait en gros une fondation pour 620 habitants. En Allemagne, c'est une fondation pour 3000 citoyens. Et une pour 5000 personnes aux États-Unis.
     
    Certes, la Suisse est un pays qui concentre pas mal de richesses : on apprenait d’ailleurs tout récemment que dans la Confédération, il y a plus de millionnaires que de bénéficiaires de l'aide sociale, 330 000 millionnaires contre 250 000 allocataires.  C'est un constat. Mais la richesse n'explique pas tout : et c'est le thème de cette édition de Geopolitis, il y a, en Suisse, un réel souci de générosité, mais ça ne se voit pas toujours, car la majorité des fondations œuvrent dans la discrétion.
     
    On peut le dire, la Suisse est riche, riche d'une longue tradition philanthropique. Deux exemples, historiques. L'hôpital de Berne, l'Insel-spital, c'est une fondation, créée en 1354,  ça fonctionne comme cela depuis 650 ans. Autre cas historique : c'est un banquier genevois, Alexandre Lombard, pour ne pas le nommer, qui a soutenu Henry Dunant[1] en 1859 lors de la création du Comité international de la Croix Rouge. Globalement, en Suisse, la fortune de ces quelques 13 000 fondations représente, c'est une estimation, 70 milliards de francs suisses. Sur ce montant, 1 milliard et demi est distribué, chaque année. On va voir comment tout cela se répartit : 40 % de ces fondations financent des programmes et des aides sociales ; 35 % se fixent pour objectif l'éducation, la science et la recherche ; 25 %, un quart, s'orientent vers la culture, au sens large et 20 %  œuvrent dans le domaine de la santé.
    Le tout faisant, vous l’avez remarqué, plus de 100 %, car certaines fondations ont plusieurs secteurs d'activité. Changement d'époque, de continent et de paramètres : aux États-Unis, les plus grands philanthropes, ce sont bien souvent les fortunes issues de la nouvelle économie, on pense, entre autres, à Bill Gates[2]. On voit ainsi apparaitre un nouveau profil de donateurs, des  hommes ou des femmes ayant formidablement réussi dans leurs entreprises et qui, vocabulaire à l'appui, importent leurs pratiques du monde du business, on parle ainsi de philanthropie du risque,  « venture-philanthropy ». Et un tournant important a été pris il y a 4 ans lorsque des hommes comme Bill Gates et Warren Buffet[3] ont dicté un nouveau code de conduite pour les milliardaires.
     
     
    Extrait vidéo
     
    D'accord, mais n'oublions pas ceci : aux États-Unis, les philanthropes évitent des droits de succession pouvant atteindre les 40 %. On va voir que le côté fiscal de la chose, cela peut faciliter grandement la philanthropie.
     
    LE REPORTAGE
     
    Le cas de la Suisse
     
    Il est un fait que la tradition historique suisse encourage, et depuis longtemps, l'activité des fondations et le principe du mécénat. C'est en 1835 qu'une première législation, à Zurich, fait du pays l'un des lieux européens les plus accueillants, dispositif accru par la législation fédérale de 1907 qui cimente un cadre juridique et fiscal efficace et simple : la Suisse autorise sans bureaucratie excessive toute création de fondations. Il suffit de s'inscrire au registre du commerce. Actuellement, un capital de 10 000 francs suffit  pour établir une fondation cantonale, et 50 000 pour une fondation à vocation internationale. On évoque souvent des noms bien connus en Suisse, Wilsdorf, Sandoz, Hoffmann, Bertarelli, Wyss, Schmidheiny, etc. Mais c'est oublier que près de 50 % de l'ensemble des fondations disposent d'un capital de moins de 2 millions de francs suisses d'actif. Et une sur cinq détient un capital de moins de 250 000 francs. Il existe du reste un mouvement consistant à regrouper plusieurs « petites » fondations sous l'auvent d'une plus grande qui peut offrir son « savoir-faire ». À Zurich, s'est créée une fondation des fondateurs, une entité qui, entre autres avantages, peut mutualiser les coûts de fonctionnement. Un mot, sur le point de vue fiscal. Pour résumer, retenons que les donations consenties à des fondations d'utilité publique sont déductibles des impôts. À Genève, c'est un exemple,  cette déductibilité peut se traduire jusqu'à un montant de 20 % du revenu net, avant déduction du don lui-même.
     
     
    Le cas de l’Amérique
     
    C'est toute la thèse d'un essayiste français bien connu, Guy Sorman, qui explique, dans son dernier livre, que la philanthropie est constitutive de la civilisation américaine et de son identité. À la différence de l'Europe, aux États-Unis, la philanthropie intervient, par définition, dans tout ce qui n'est pas du ressort du système capitaliste ou de l'État. Depuis fort longtemps, dans une Amérique à la fois religieuse et laïque, les fondations Rockefeller, Ford ou Carnegie, pour ne citer que les plus anciennes, ou les entités créées, plus récemment , par Bill Gates, George Soros ou Warren Buffet, semblent obéir au sermon d'un pasteur célèbre dans l'Amérique du 17e siècle,  John Winthrop, qui déclarait : « Dieu a voulu qu'il y ait des riches et des pauvres, de manière qu'entre les riches et les pauvres s'instaure un échange ». Fin de citation. D'où l'idée particulièrement répandue en Amérique selon laquelle les très riches se disent qu'ils ont eu de la chance, et que, à ce titre, ils doivent restituer tout ou partie de cette chance à leurs semblables. Un service d'autant plus nécessaire que l'Américain, globalement, n'aime pas trop l'État, considère que c'est un mal nécessaire, et déclare faire plutôt confiance à la société civile.
     
     
     
    L’EDITORIAL
     
    Le métier de philanthrope, cela s'apprend ! D'abord parce que c'est une activité  de plus en plus complexe. Ensuite, parce que la demande de personnel qualifié ne fait qu'augmenter. À ce sujet, Bâle et Genève peuvent se proclamer capitales de la philanthropie, Bâle, avec son centre d'études de la philanthropie, dépendant de l'université, et qui délivre désormais un certificat en gestion de fondations donatrices. Genève, ensuite, qui profite de sa légitimité internationale pour organiser séminaires, formations, et mêmes rencontres européennes, comme il y a un an, regroupant 500 financiers, entrepreneurs, acteurs sociaux ou universitaires d'une trentaine de pays. C'est qu'il y a, en Suisse, environ 4500  personnes  qui travaillent activement pour le compte de ces quelque 13 000 fondations, avec un potentiel de formation et de recrutement important, d'où, par exemple, un module d'enseignement à l'Institut genevois des hautes études internationales et du développement. En somme, avec le temps, l'action philanthropique se professionnalise. On vous le dit : c'est un métier !
     
     
     
     

    [1] Henry Dunant est né le 8 mai 1828 à Genève et est mort le 30 octobre 1910. Homme d’affaires humaniste, il est le fondateur de la Croix-Rouge. Il obtient avec Frédéric Passy le premier prix Nobel de la paix en 1901.
    [2] Bill Gates est un informaticien et un entrepreneur américain. Il a fondé en 1975, à l'âge de 20 ans, avec son ami Paul Allen, la société Microsoft.
    [3] Warren Buffet est un homme d'affaires et investisseur américain. Il fait partie des hommes les plus riches du monde depuis le début du XXIe siècle.