Voix off
En apparence, rien n’a changé : les mêmes bobines, le même bruit de machine et Mahmoud toujours aussi concentré depuis 20 ans, à un détail près, pour la première fois de sa vie, ce couturier est inscrit à la sécurité sociale. Le Maroc vient de lancer une couverture sanitaire universelle qui vise 22 millions de citoyens d’ici fin 2022.
Mahmoud Bensliman, couturier
Ça fait 17 ans maintenant que je paie mes impôts, des impôts professionnels et des impôts sur le revenu bien sûr et ça me permettait pas de profiter de la sécurité sociale. Donc pour n’importe quelle intervention médicale ou pour n’importe quel achat de médicaments, tout était à notre charge.
Voix off
Situation partagée par tous les artisans, agriculteurs et commerçants non-salariés au Maroc. Il y a cinq ans Mahmoud a dû subir deux opérations très lourdes qui lui ont coûté près de 10 000 €. Ses amis ont payé pour lui, car seule solution à l’époque : cotiser auprès des fonds privés ou avoir de l’argent de côté.
Mahmoud Bensliman, couturier
C’était pas mon cas donc j’avais rien d’épargne1 et j’avais aucun sou pour, franchement, m'affronter à une telle situation2.
La journaliste
Et aujourd’hui, ça vous coûte combien cette sécurité sociale ?
Mahmoud Bensliman, couturier
Pour le moment je pense que ça coûte annuellement vers3 2 400 dirhams, une cotisation de 2 400 dirhams.
Voix off
Soit près de 220 € par an, qui lui ouvriront dans six mois, les premiers remboursements de frais médicaux. Cette réforme est fondamentale au Maroc, mais sonne déjà comme un défi pour le corps médical. De meilleurs remboursements amèneront plus de patients alors que le nombre actuel de médecins au Maroc est déjà insuffisant.
Jaâfar Heikel, professeur en médecine
La couverture sanitaire universelle est un projet titanesque initié par Sa Majesté le roi et qui demande au gouvernement un effort énorme pour les 25 prochaines années, de corriger les insuffisances donc de bien entendu renforcer les acquis, parce qu’il y a donc des acquis, d’améliorer l’accessibilité donc des citoyens aux services de santé, quelle que soit leur couverture, quels que soient leurs moyens et leurs revenus, améliorer également la qualité des services, la performance dans les infrastructures, de réfléchir autrement sur le plan régional et en fait ceci ne peut réussir sans une refonte totale, d’ailleurs aussi demandée par Sa Majesté, de notre système de santé dans toutes ses dimensions.
Voix off
Un projet titanesque qui en cache donc un autre, mais salué comme une révolution sociale, et ce ne serait qu’un début, l’État prévoit une généralisation de la retraite et des allocations familiales pour 2023 et 2024.