Aude Gogny-Goubert, présentatrice
Athlétisme, Algérie et choix vestimentaire. Hassiba Boulmerka1. Hassiba Boulmerka est une championne olympique d’athlétisme et un symbole d’émancipation pour les femmes dans le sport. Hassiba Boulmerka naît le 18 juillet 1968 en Algérie. Elle grandit à Constantine2 où très tôt elle se découvre une passion pour la course à pied. Repérée par l’entraîneur Aboud Labed, elle commence tout de suite à… Ben non ! Pas tout de suite, puisque son père était contre l’idée qu’elle pratique un sport, estimant que ce n’était pas approprié pour une jeune fille. Alors après l’avoir persuadé avec son entraîneur de son sérieux et de sa détermination, elle commence à pratiquer la course à pied au club d’athlétisme du MO Constantine et s’oriente dans les épreuves du 800 mètres et du 1 500 mètres. En 1991, aussi déterminée que sérieuse, elle participe aux Championnats du monde d’athlétisme à Tokyo, au Japon. Elle décroche la médaille d’or dans le 1 500 mètres et réalise un exploit historique en devenant la première femme africaine à remporter un titre mondial d’athlétisme, devenant ainsi une héroïne nationale en Algérie. L’année suivante, une guerre civile3 éclate entre le gouvernement algérien et des groupes islamistes armés. Cette guerre dure une décennie et fait plus de 100 000 morts. C’est dans ce contexte qu’Hassiba décroche l’or au 1 500 mètres aux JO d’été de 1992 à Barcelone, en Espagne. Elle devient alors un symbole de la pratique sportive féminine en Algérie, mais aussi une incarnation du combat pour l’égalité des sexes dans le sport. La raison ? Elle refuse catégoriquement de porter le voile, à l’époque de plus en plus utilisé comme un symbole politique par les islamistes. Elle estime que c’est une histoire entre Dieu et elle, et que sa tenue vestimentaire ne regarde personne. Avec ce refus, elle affirme sa liberté individuelle, son indépendance et son attachement à une Algérie laïque et moderne, sans se conformer aux diktats d’une société patriarcale. Et encore moins aux injonctions des islamistes. Mais une idéologie ne se laisse pas tordre le cou sans lutter, et à plusieurs reprises, la vie d’Hassiba Boulmerka est mise en danger. « J’ai eu une carrière très difficile. En plus des sacrifices liés à l’entraînement et la pression, j’ai supporté les menaces de mort des islamistes, car je représentais la femme émancipée. Cette image a aussi constitué une pression venant des médias internationaux. Le résultat est que mes victoires étaient pour moi sportives et politiques. Quand je gagnais, beaucoup de femmes gagnaient avec moi. » [Hassiba Boulmerka] C’est sans doute là que la grandeur d’un engagement prend le plus de sens, lorsqu’il dépasse le stade de la réussite personnelle pour servir au plus grand nombre.
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1 Hassiba Boulmerka est une athlète algérienne spécialiste des courses de demi-fond, dont la carrière s'est étirée de 1986 à 1997. Le 8 août 1992, à Barcelone, elle a offert le premier titre olympique à l’Algérie, dans un contexte politique marqué par la poussée de l'extrémisme islamiste et la guerre civile. (Source : Wikipédia)
2 3e ville du pays derrière Oran et Alger, située au nord-est, Constantine est la capitale de l’Est de l’Algérie.
3 La guerre civile algérienne ou décennie noire, également appelée années de plomb ou années noires, est une guerre civile qui a opposé entre 1992 et 2002 le gouvernement algérien et divers groupes islamistes et rebelles. Le conflit s'est achevé par la victoire des forces gouvernementales avec la reddition de l'Armée islamique du salut (AIS) et la défaite du Groupe islamique armé (GIA). (Source : Wikipédia)