Afghanistan : partir ou rester ?

Disponible jusqu'au 30/08/2027 - 15:00Disponible jusqu'au 30/08/2027

Pays en guerre : le choix difficile des populations.

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Durée
10:07

Vidéo

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Ressources pédagogiques
  • B1
    Adultes

B1 intermédiaire

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Concevoir une affiche de sensibilisation aux problématiques migratoires.

Adultes
Grammaire : verbes + prépositions
Regarder : Regarder
Vocabulaire : catastrophes humaines
Vocabulaire : immigration
Fiche enseignant
Fiche apprenant
Contenus complementaires

    Rester et subir la guerre chez soi, en Afghanistan, ou partir et reconstruire sa vie ailleurs ?
    Deux Afghans et deux Afghanes expliquent leur choix.

    Chaîne d'origine
    TV5MONDE
    - Modifié le
    27/01/2022

    Angélique Kidjo 

    Chaque jour, des milliers de personnes dans le monde doivent prendre l’une des décisions les plus difficiles : rester et risquer la mort ou le dénuement, ou bien fuir pour trouver la sécurité et risquer de tout perdre. En Afghanistan, un récit sur comment faire ce choix.

     

    Helena Sabooricinéaste et nageuse

    En ce moment, ma famille est divisée : 50 % veulent partir, 50 % veulent rester. Moi, je suis réaliste, mais parfois il faut rêver. (Rire). Ok.

     

    Abrash Seddique

    Ma famille est partie il y a sept ans et je devais partir avec eux. Mais je n’ai jamais abandonné, je suis resté. - C’est pour toi. - En Allemagne, ma famille m’a dit : « tu es venu jusqu’en Allemagne, demande l’asile ici et reste. Pourquoi tu repars en Afghanistan ? » J’observais leur vie là-bas, les belles routes, les voitures rapides. C’est sûr qu’on n’en a pas en Afghanistan, mais c’est l’Afghanistan. On a du pain local et des fruits frais. Et on va chez la famille pour être ensemble. Alors on a une vie où personne ne pose de questions. Personne ne me regarde en se disant : tu n’es pas à ta place. Ça me brise le cœur qu’en quinze ans, nous n’ayons pas fait de ce pays un endroit où on veut vivre. On ne serait pas obligés de partir, de trouver un autre pays.

     

    Helena Sabooricinéaste et nageuse

    Je fais essentiellement des films. J’ai un autre projet : la natation. Monter une équipe féminine de natation. L’espoir, c’est le projet qui représente 50 % des raisons pour lesquelles je suis restée malgré les bombardements, malgré le fait de ne pas savoir ce qui va m’arriver quand je rentre le soir. Disons qu’on arrive sur les côtes turques ou grecques, super, et après ?

    Je me rends compte que ceux qui partent sont perdus. Il faut tout recommencer : on ne parle pas la langue et puis, ce qu’on a fait comme études ou  non, les diplômes. Et qu’est-ce qu’on est censés faire ? Il faut tout lâcher, c’est comme renaître.

     

    Dr Rana Qaderigynécologue

    Je suis médecin, mais je sais que là-bas je ne suis rien.

     

    Dr Wahid Qaderidentiste

    Côté finances, nous n’avons pas de problèmes d’argent. Nous avons une clinique, du travail, de bons revenus. Nous avons cinq enfants : trois filles et deux garçons.

     

    Dr Rana Qaderigynécologue

    Ils devraient connaitre la paix, il faudrait la paix pour nos enfants.  

     

    Dr Wahid Qaderidentiste

    Le chat est parti, tu as vu ? Deux de mes frères ont été tués dans des attentats suicides, deux de mes frères. Quand je pars au travail le matin, mes enfants se demandent si je vais rentrer vivant.

     

    Dr Rana Qaderigynécologue

    Les gens que vous voyez en Afghanistan, ce sont les plus résilients, ils ont tout vécu, c’est pire de jour en jour. C’est pire, pas mieux.  

     

    Dr Wahid Qaderidentiste

    Il y a beaucoup de problèmes. Parler de partir me fend le cœur, croyez-moi. J’en ai les larmes aux yeux. Comment pourrais-je quitter mon pays ? Si je ne traite pas mes patients, si elle ne traite pas les siens, qui va le faire ? Si la sécurité était assurée, nous ne partirions jamais.

     

    Dr Rana Qaderigynécologue

    J’ai très peur de la mer. Mais j’ai surtout peur pour les enfants.              

     

    Dr Wahid Qaderidentiste

    Nous avons un visa pour la Turquie, on sera en règle jusque-là. Après, on est inquiets pour le voyage, mais juste une journée. Si on meurt, on meurt un jour. Si on vit ici, on meurt tous les jours.

     

    Dr Rana Qaderigynécologue

    Toute notre vie.

     

    Dr Wahid Qaderidentiste

    Nous mourrons chaque jour. Nous préférons cette situation-là à l’actuelle.

     

    Abrash Seddique

    Cette semaine, à l’exception de celle où j’ai perdu mon père, c’est la plus dure de ma vie. J’ai reçu un visa spécial pour les États-Unis. J’en suis reconnaissant, ça va probablement me sauver la vie. Mais c’est difficile d’expliquer ce que je ressens en ce moment. Quand j’entendais mon père parler de mère patrie et de son amour pour le pays, on se moquait de lui et on répondait : « qu’est-ce que la mère patrie nous a donné ? La guerre civile, constamment se déplacer, tous les traumatismes et toute cette folie, les gens massacrés, tués et notre vie est en danger, c’est ça que la mère patrie fait pour nous ? » En partant, ma mère pleurait et j’essayais de la calmer, de la rassurer, mais je me demandais pourquoi elle pleurait. Elle me disait simplement : « tu ne comprends pas assez le pays. » Et moi, je répondais : « quelle partie ? Les explosions sur la route ? Les tueries, les viols, le chaos, c’est ça qui va te manquer ? » Et ma mère disait : « tu refuses de comprendre. C’est une émotion que tu ressentiras un jour. »  Et maintenant, je comprends, je peux m’identifier. Je voudrais que mon père soit là, je lui dirais que je comprends ce qu’est la mère patrie. 

     

    Helena Sabooricinéaste et nageuse

    Quand je vais voir mes amis pour leur demander de l’aide au travail, ils me disent : « pourquoi tu es si heureuse ? On regarde les actualités et on ne pense plus qu’à ça. Je dis : « mon ami, je suis vivante. Ceux qui sont morts, on peut raconter leur histoire, leurs souvenirs. Mais, vivants, ils parlent de leurs rêves, des rêves désormais irréalisables. » Je leur dis : « je suis vivante, aidez-moi à faire mon film. Comme ça, si je suis tuée dans un attentat demain, vous ne culpabiliserez pas. La plupart des amis à qui j’ai parlé, à qui j’ai demandé un avis, veulent soit rester ici à tout prix, soit disent non. Après avoir risqué nos vies depuis si longtemps ici, ils choisissent de prendre un autre risque là-bas. Quand je parle à mes amis, je dis : « prenons le risque ensemble de rester ici, pour voir ce qui se passera. »